Il était une fois une famille de huit frères et sœurs. Ils n’avaient pour seul bien qu’un lopin de terre où ils habitaient et plantaient des ignames dans l’arrière-cour. Mêmes si nos amis n’étaient pas riches, le petit champ d’ignames leur permettait de joindre les deux bouts et ne pas avoir faim, car les tubercules étaient gros et fort nourrissants. Mais une querelle incompréhensible et malsaine éclata au sein de la fratrie. Très vite, les conséquences se sont fait sentir.
L’arrière-cour où poussaient les grosses et belles ignames est devenue litigieuse et on ne pouvait plus exploiter qu’une toute petite partie de ce périmètre qui n’était déjà pas grand. Les huit frères et sœurs passaient le plus clair de leur temps à se quereller, s’invectiver et parfois même à se bagarrer jusqu’au sang. La nourriture a commencé à manquer alors que l’arrière-cour était là, poussant désormais des mauvaises herbes, au lieu des ignames.
L’ainé de la famille tint conseil plusieurs fois en réunissant la famille pour des pourparlers. Rien n’y fit, aucun des frères et sœurs n’était prêt à renoncer à ses opinions. La faim a fini par s’installer dans la maison. Il n’y avait plus qu’un seul tubercule à se partager chaque jour. L’ainé avait d’énormes difficultés à servir tout le monde. Quand Koffi en réclamait plus, il coupait un morceau d’igname de Kodjo pour le lui donner. Kodjo en réclamait alors et l’ainé prenait un morceau chez Kossi pour le satisfaire. Kossi se fâchait et l’ainé en prenait chez sa sœur Abla pour résoudre le problème et ainsi de suite.
La famille était devenue ingérable, un sac de hérissons difficile à porter sur le dos. Malgré toute la bonne volonté de l’ainé, la nourriture manquait de plus en plus. De plus en plus, il coupait ici pour satisfaire là. L’arrière-cour continuait à être litigieuse et les mauvaises herbes continuaient à y pousser. Surexploitée, la minuscule parcelle s’appauvrit rapidement, mais notre ainé est là. Il se creuse la tête, cherchant toujours comment mieux partager le trop peu d’igname récoltée à chaque saison.
Ainsi va le Togo avec sa population de huit frères…pardon, huit millions d’habitants qui s’est enlisée dans une querelle intestine. Il a un gouvernement qui ne cherche pas trop à résoudre les problèmes qui divisent et empêchent de travailler ensemble. Un gouvernement qui préfère partager des 5000 francs de Novissi aux miséreux, créer des projets Wezou pour les femmes pauvres, faire des prêts aux fonctionnaires indigents, acheter des cahiers aux élèves nécessiteux etc. Et pourtant, cela saute aux yeux que la solution est qu’il faut mettre fin à la crise politique qui plombe notre capacité à produire des biens, des services et de la richesse.
Le champ risque de rester en friche et les Togolais affamés, tant que les prisonniers politiques seront en prison, les exilés en exil, les populations apeurées dans la torpeur et tant que le fonctionnement de l’Etat ne permettra pas aux uns et aux autres de se mettre au travail pour déployer leur génie créateur dans une vraie République et non une République de Novissi.
Cet éditorial, c’est notre façon d’attirer l’attention du chef de l’Etat Faure sur la nécessité de chercher à ramener l’unité et la concorde nationales mises malheureusement de plus en plus à rude épreuve dans notre pays.
N’djo