Ceci est mon histoire, l’histoire d’un Togolais pris entre deux feux au nord du Mali. Pour ma protection, pas besoin de vous dire mon nom. Si j’ai quitté le Togo il y a plusieurs années, c’est pour fuir la misère dans laquelle je vivais au pays. Mon parcours m’a amené à résider au Niger puis aujourd’hui au nord Mali.

Ce 31 décembre 2024, alors que toute la ville de Douenza se préparait à entrer dans la nouvelle année 2025, moi et mes voisins, on s’est réveillé sous les tirs nourris d’armes lourdes. Il avait d’un côté les terroristes qui tentaient de rentrer dans la ville, et de l’autre côté, l’armée qui cherchait à les repousser. Après plus de deux heures d’affrontements à quelques mètres de ma maison, le calme est revenu et un silence de cimetière a envahi la ville, avec une fumée qui sentait la viande brûlée et montait vers le ciel. Vers midi, j’ai réussi à sortir de sa cachette. Le spectacle est incroyable et effroyable: des personnes sans tête allongées sur le sol, des corps brûlés, des morceaux de chair éparpillés devant ma maison.

Cette scène d’horreur n’est pas un film, mais une terrible réalité que je vous raconte. J’ai toujours gardé sur moi le numéro de votre journal Sika’a qui fait partie de mes souvenirs. Je pense à mon pays natal le Togo, les larmes aux yeux. Vivement la paix ici, on en a besoin.
